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Intelligence Artificielle et développement des compétences : où en est le marché ?

Margaux Daza |

L’usage de l’intelligence artificielle (IA) dans le Learning & Development (L&D) fait débat car certains n’y voient pas le potentiel du « Big Data » : les données sont nombreuses mais parfois difficilement accessibles et rarement très qualifiées. Alors, pourquoi ne pas plutôt parler de « Smart Data » ?

Le Smart Data est une approche s’intéressant au traitement en temps réel de données exclusivement qualifiées, qui permet aux fonctions L&D de gagner en efficience et d’offrir une formation au plus près des besoins individuels des collaborateurs.

La formation n’en est plus à ses débuts

Si l’IA a un rôle à jouer dans la formation, c’est que les entreprises ne manquent pas de données à analyser : les LMS et autres plateformes de formation ont trouvé leur place dans les entreprises depuis des années, ce qui a permis de tracer les activités de formation des collaborateurs. Ces activités de formation représentent des données très qualifiées que nous pouvons appeler Smart Data. La valeur ajoutée de l’IA est de pouvoir automatiser un certain nombre de tâches qui seraient trop longues (voire impossibles) pour les formateurs, managers et autres responsables RH.

Pour traiter ces Smart Data, des algorithmes de machine learning entrent en jeu. Ces algorithmes sont similaires à ceux utilisés dans les domaines du marketing et de la finance par exemple. Attention toutefois : l’IA ne vient pas remplacer la fonction L&D mais elle intervient comme un assistant dans le but de répondre au mieux aux besoins de compétences des entreprises et aux besoins d’employabilité des collaborateurs.

Retour sur les origines de l’IA dans l’article « Introduction à l’Intelligence Artificielle »

Engager le collaborateur dans sa formation

À l’image de plateformes comme Netflix ou Amazon, qui cherchent à déterminer votre profil utilisateur pour vous suggérer du contenu adapté, l’usage de l’IA dans la formation vise à définir votre profil apprenant afin de vous recommander un parcours pédagogique sur-mesure. Et les problématiques à adresser sont variées, en voici quelques exemples : la massification de la formation fait parfois perdre en qualité et en pertinence (le fameux one-size-fits-all) ; certains managers mobilisent une part trop importante de leur temps à construire les plans de formation de leurs collaborateurs ; certains parcours e‑learning, conçus pour réduire les coûts, sont trop longs et n’arrivent pas à engager l’apprenant jusqu’au bout.

L’analyse des données permet de comprendre le comportement d’apprentissage et les besoins d’un collaborateur en termes de compétences, l’enjeu étant de le rendre acteur de son parcours et de favoriser des logiques de formation en autonomie. Voici quelques exemples de fonctionnalités pouvant être mises en œuvre à partir de cette analyse :

  • La construction automatique de plans de formation adaptés au niveau de compétences de chaque collaborateur et aux attendus métiers, vis-à-vis des référentiels ou de la GPEC de l’entreprise.
  • La personnalisation de parcours e‑learning pour optimiser le chemin du collaborateur en fonction de son niveau de départ et de sa progression.
  • L’accompagnement du collaborateur sur le long terme en le re-sollicitant de façon personnalisée sur des compétences acquises au cours de sa carrière et susceptibles d’être oubliées.
  • La recommandation de contenus pédagogiques, internes ou externes à l’entreprise, susceptibles d’intéresser le collaborateur selon ses expériences passées et selon les expériences des autres collaborateurs qui lui ressemblent, dans le but d’améliorer l’engagement sur le dispositif de formation.

Pour aller plus loin, téléchargez le livre blanc « Intelligence Artificielle et Gestion des RH »

Accompagner la production de contenu pédagogique

Pour mettre en oeuvre une stratégie d’apprentissage learner-centric (centrée sur l’apprenant), un autre prérequis pour une formation plus engageante est d’offrir un contenu pédagogique de qualité, tout en tirant profit des différentes modalités possibles (présentielles et distancielles). Or la conception de contenu et sa déclinaison dans des formats variés est longue et coûteuse. Le potentiel de l’IA pour automatiser une partie de l’ingénierie pédagogique est énorme mais, sur ce point, elle en est encore à ses balbutiements.

Les technologies concernées sont le NLP et le NLG : en français, le traitement automatique du langage naturel et la génération automatique de texte. La première va permettre aux équipes pédagogiques de gagner du temps dans l’indexation du contenu existant. En analysant les ressources pédagogiques, on peut y trouver les thèmes qui y sont abordés et en déduire les compétences visées, un travail de tagging essentiel pour les systèmes de recommandation (voir plus haut). Au-delà du contenu déjà disponible dans le catalogue de formation de l’entreprise, il devient même possible d’aller chercher une vidéo sur YouTube, de tagger automatiquement les compétences qu’elle vise et de l’intégrer au catalogue. Quant au NLG, il va permettre d’aller un cran plus loin et de générer automatiquement des questions d’évaluation à partir d’une ressource pédagogique, questions qui pourront être utilisées pour positionner un collaborateur en termes de maîtrise ou pour faire de l’ancrage. Les ingénieurs pédagogiques garderont évidemment un rôle de sélection et de validation de ces questions.

Ces apports de l’IA sont à appréhender comme une aide à la fonction L&D et, quels que soient les outils mis en œuvre, il est essentiel de mettre l’accent sur les analytics et le reporting pour donner de la visibilité au collaborateur, au formateur, au manager et aux responsables RH.